Le buteur ruthénois, Lucas Buades, a été bousculé vendredi soir par un intrus entré sur la pelouse lors du match Bordeaux-Rodez en Ligue 2 au stade Matmut Atlantique. Ce nouvel incident renvoie le football français à ses pires démons après une saison 2021-2022 ponctuée de nombreux débordements en tribune.
Le match a viré au mauvais film. La rencontre entre Bordeaux et Rodez, match crucial pour le dénouement de la Ligue 2, a été définitivement arrêté vendredi 2 juin après l’agression d’un joueur ruthénois par un supporter, frustrant le rêve d’une remontée bordelaise et renvoyant le football français à ses démons.
Un intrus est descendu sur la pelouse pour bousculer l’ailier de Rodez Lucas Buades, qui venait d’ouvrir le score lors de cette 38e et dernière journée de L2, devant les plus de 40 000 supporters massés au Matmut Atlantique. Le joueur s’est alors effondré au sol au pied de la tribune des Ultramarines et le supporter a été rapidement maîtrisé par les services de sécurité du club.
Appliquant le protocole, l’arbitre Nicolas Rainville a décidé de renvoyer les deux équipes aux vestiaires à la 23e minute, avant d’acter un peu avant 22 h 00 l’arrêt définitif de ce match décisif pour la montée côté girondin, pour le maintien côté ruthénois.
“Lors de la célébration du but des Ruthénois, un spectateur est rentré sur le terrain et est venu agresser, pousser violemment un joueur”, s’est justifié l’arbitre en conférence de presse
“Les éléments sont probants, le joueur ne peut reprendre la rencontre puisque commotionné. Nous avons respecté le règlement, à savoir que le match ne reprendra pas”, a-t-il ajouté.
Emmené à l’hôpital
Lucas Buades s’est fait soigner pendant trois minutes avant de regagner à son tour les vestiaires. Nicolas Rainville a indiqué que le joueur avait été ausculté à la fois par le médecin de son club et par le médecin urgentiste de garde.
“Il avait une commotion, il n’était pas bien dans le vestiaire. Là il est parti à l’hôpital”, a confirmé Didier Santini, l’entraîneur de Rodez.
“C’est navrant de se retrouver avec un joueur hors-course dans un match avec autant d’importance, et que les gens soient aussi stupides”, a-t-il estimé. “Il faut que la Ligue, la Fédération, les clubs trouvent (une) solution et qu’on soit beaucoup plus dur.”
La Ligue de football professionnel a annoncé que sa Commission de discipline se réunirait “dès lundi pour étudier les suites à donner”.
“La LFP condamne fortement cet acte de violence à l’encontre d’un joueur et souhaite un prompt rétablissement à Lucas Buades”, a-t-elle ajouté.
La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a salué “la décision ferme de la LFP” : “La violence n’a pas sa place dans les stades et notre ligne est claire : zéro tolérance”, a-t-elle tweeté, en prévenant qu’elle sera “très attentive aux sanctions qui seront prises par les instances et par la justice”.
Je salue la décision ferme de la LFP d’arrêter définitivement la rencontre Bordeaux-Rodez, prise en application du protocole de gestion de crise validé conjointement par l’État et le football français.
La violence n’a pas sa place dans les stades et notre ligne est claire : https://t.co/qYqEDAfMIw— Amélie Oudéa-Castéra (@AOC1978) June 2, 2023
Cette agression pourrait sonner le glas de l’ambition des Girondins de remonter en Ligue 1, un an après avoir quitté l’élite : lors de cette ultime journée, le club bordelais devait gagner et espérer doubler Le Havre ou Metz, respectivement premier et deuxième, pour décrocher son billet.
Le club va porter plainte
Peu après 23 h, le président de Bordeaux Gérard Lopez s’est présenté à son tour en conférence de presse. “Pour préserver les droits du club et l’institution, ce qui est le plus important, on va porter plainte contre l’individu”, a déclaré le dirigeant qui a salué le comportement des 42 000 personnes présentes au stade qui “sont parties dans un calme absolu alors que c’est une situation qui aurait pu être tendue dans beaucoup de clubs”.
Souhaitant que l’épilogue de ce Bordeaux-Rodez “se joue sportivement et sur un terrain car ça reste du foot”, il a ajouté que son club “fera valoir tous (ses) droits, ainsi que les droits en appel” lundi devant la commission de discipline.
“On verra quels sont les recours mais on ne s’interdit rien ce (vendredi) soir, a ajouté une source proche du club. En l’état, le film des événements n’est pas clair. On a vraiment besoin de se poser pour regarder ce qui s’est passé”.
“La fête a été gâchée”, a résumé le maire de Bordeaux, Pierre Hurmic, également descendu au bord du terrain pendant l’interruption. “Un individu, un sur 42 000, a gâché la fête. Je trouve ça regrettable, décevant, je suis, comme tous les spectateurs, très déçu.”
Une saison ponctuée de débordements
Ce nouvel incident renvoie le football français à ses pires démons après une saison 2021-2022 ponctuée de nombreux débordements en tribune, notamment un jet de bouteille en plastique ayant visé le milieu marseillais Dimitri Payet lors d’un match houleux OL-OM.
La commission de discipline de la LFP avait alors décidé de retirer un point à l’OL, et de rejouer le match à huis clos, au Groupama Stadium de Décines-Charpieu.
Après ces heurts, le foot français avait tenté de prendre le problème à bras-le-corps, soutenu par trois ministères (l’Intérieur, les Sports et la Justice), avec notamment la clarification du processus décisionnel en cas d’interruption de match.
Mais les débordements se sont régulièrement invités dans les stades, entre jets de projectiles à répétition, fumigènes en pagaille, envahissements de terrain, comme encore au Havre vendredi soir… Des heurts qui ont contraint les instances à une escalade de sanctions disciplinaires, dont les Girondins et leur rêve de remontée pourraient faire les frais lundi.
Avec AFP