Connect with us

Hi, what are you looking for?

Monde

Le tennis français en quête de gloire, 40 ans après le triomphe de Yannick Noah

De notre envoyé spécial porte d’Auteuil – Aucun Français n’étant tête de série dans les tableaux des simples à Roland-Garros cette année, il est peu probable d’en voir un gagner le tournoi. Depuis 1983 et le sacre de Yannick Noah, aucun autre joueur tricolore n’a réalisé cet exploit. Mais le tennis français voit de nouveaux joueurs prêts à relever le défi, après les adieux d’une génération.

Publicité

Le 5 juin 1983, Yannick Noah remportait Roland-Garros. Quarante ans plus tard, aucun Français ne lui a succédé. L’ancien champion de tennis, devenu une star de la chanson, était de retour sur le Central de Roland-Garros le week-end dernier pour célébrer son unique sacre, cette fois un micro à la main.

Advertisement

Foulant pieds nus la célèbre terre battue rouge du court Philippe-Chatrier, il a interprété une dizaine de chansons, rejoint sur scène par son adversaire d’il y a 40 ans, Mats Wilander. Interrogé sur le manque de succès des joueurs tricolores dans le tournoi de la porte d’Auteuil depuis les années 1980, Yannick Noah s’est amusé : “Parce que je n’entraîne plus !”

Le joueur, qui a mené la France à la victoire en Coupe Davis et en Fed Cup, a ensuite donné un conseil aux jeunes Français qui espèrent percer : faire leurs valises et partir à l’étranger.

“Il faut aller te nourrir ailleurs parce qu’on est habitués à perdre à tous les niveaux”, a-t-il expliqué en conférence de presse. “Tous les entraîneurs ont perdu. Il n’y en a pas un qui a gagné ! Donc tu es entouré de gens qui ont tous perdu.”

“Comme si le Real Madrid n’avait rien gagné”

Se tourner vers l’étranger, c’est précisément ce qu’a fait la Fédération française de tennis (FFT) en faisant appel au Croate Ivan Ljubicic, ex-entraîneur de Roger Federer qui a guidé le Suisse vers trois nouveaux titres du Grand Chelem.  

Ancien numéro trois mondial, Ivan Ljubicic a été nommé à la tête de la mission Ambition 2024 qui vise à redonner de l’élan au tennis français et à former une nouvelle génération de champions. Lorsqu’il a pris ses fonctions en décembre, l’imposant Croate s’est dit déconcerté par le manque de succès du tennis en France.

“Le tennis français […] est celui qui rend le plus curieux ceux qui ne sont pas français”, a-t-il déclaré au journal L’Équipe. “C’est comme si le Real Madrid n’avait rien gagné pendant longtemps.”

De son côté, le Suisse Stan Wawrinka, vainqueur de Roland-Garros en 2015, a émis des remarques plus tranchantes lors d’un tournoi à Marseille en début d’année, déclarant qu’il était “triste” de ne pas voir de meilleurs joueurs dans un pays qui a “un Grand Chelem et de nombreuses ressources pour investir dans l’avenir du tennis”.

Yannick Noah lors de l'inauguration d'une fresque retraçant ses exploits, notamment sa victoire en 1983, dans l'enceinte du stade Roland-Garros, le 28 mai 2023.
Yannick Noah lors de l’inauguration d’une fresque retraçant ses exploits, notamment sa victoire en 1983, dans l’enceinte du stade Roland-Garros, le 28 mai 2023. © Anne-Christine Poujoulat, AFP

L’autoflagellation est récurrente à Roland-Garros, notamment lors des années anniversaires. En 2018, alors que les organisateurs célébraient les 30 ans de la dernière participation d’un Français – Henri Leconte – à la finale, celui-ci a fustigé le manque de dévouement et de force mentale des joueurs.

“Ils ne s’entraînent plus autant sur la terre battue qu’avant”, avait déclaré Henri Leconte à Reuters. “Ils ont peur de jouer à Roland-Garros. Ils viennent toujours avec une excuse, disant ‘Oh, j’ai mal au dos ou au coude.'”

Si ce jugement est sévère, il reste aujourd’hui partagé par certains supporters rencontrés à Roland-Garros, qui soulignent l’incapacité des joueurs français à répondre aux attentes. “Les Français ont de grands courts et de grands joueurs, mais à ce niveau du tennis, c’est la force mentale qui fait la différence”, confie Marcus, un habitué des tournois de tennis venu du Danemark. Le quadragénaire fait un parallèle avec l’ancien numéro un mondial Andy Murray, qui a mis fin à une attente de plusieurs décennies pour un titre masculin du Grand Chelem “malgré une pression encore plus grande à Wimbledon“.

Andy Murray, qui a perdu huit de ses onze finales du Grand Chelem, toutes contre Novak Djokovic ou Roger Federer, aurait certainement connu plus de succès s’il n’avait pas vécu à l’ère des “Big Three” (avec Rafael Nadal). Sur l’antenne de RMC, Marion Bartoli, dernière joueuse française à avoir remporté un tournoi majeur en 2013, a également pointé le “défi psychologique” de s’imposer à la maison : “Ce qui a manqué à Jo-Wilfried Tsonga et Gaël Monfils [pour remporter Roland-Garros, NDLR], c’est qu’il fallait battre de très grands joueurs de manière consécutive. Ils sont arrivés à faire l’exploit une fois, voire deux fois, et puis après, il y a une fatigue qui s’installe. Il y a la pression qui monte […]. Et bien évidemment, de gagner à la maison, ça représente un défi psychologique.”

À lire aussi “Quelle tristesse !” : Roland-Garros s’ouvre sans sa légende Rafael Nadal

La quantité au détriment de la qualité

Déjà en 2018, Henri Leconte jugeait que la FFT avait sa part de responsabilité dans le choix de la “quantité au détriment de la qualité”, en encourageant une abondance de jeunes talents au lieu de se concentrer sur les quelques joueurs les plus prometteurs.

Au cours des 20 dernières années, de nombreux joueurs français ont figuré dans le top 100 du classement ATP. Cette situation explique pourquoi les Français, en tant qu’équipe, se sont souvent bien portés en Coupe Davis. Pourtant, sur la même période, aucun joueur ne s’est approché de la victoire dans un tournoi du Grand Chelem. Seuls Arnaud Clément (à l’Open d’Australie en 2001) et Jo-Wilfried Tsonga (au même endroit en 2008) ont atteint une finale au XXIe siècle.

Les partisans du modèle français soulignent toutefois que les titres individuels du Grand Chelem ne sont pas la seule façon de mesurer le succès. La France possède le deuxième plus grand nombre de licenciés en Europe, derrière l’Allemagne, et ses clubs sont enviés par la plupart des pays européens.

Depuis 2000, le tennis féminin français renaît peu à peu de ses cendres avec quatre titres du Grand Chelem en simple : Mary Pierce à Roland Garros en 2000, Amélie Mauresmo à l’Open d’Australie et à Wimbledon en 2006 et Marion Bartoli à Wimbledon en 2013.

Caroline Garcia lors de son premier tour face à Xiyu Wang à Roland-Garros, le 29 mai 2023.
Caroline Garcia lors de son premier tour face à Xiyu Wang à Roland-Garros, le 29 mai 2023. © Pierre René-Worms, France Médias Monde

Une fois de plus, les espoirs du pays reposent en grande partie sur une femme, la numéro cinq mondiale Caroline Garcia, qui a battu lundi la Chinoise Xiyu Wang en trois sets (7-6, 4-6, 6-4), six mois après son triomphe aux Masters de la WTA à Fort Worth, au Texas.

“N’oubliez pas les filles !”, a déclaré Yannick Noah après son concert samedi sur le Central de Roland-Garros. “Les femmes ont remporté des victoires. Nous devrions en parler aussi.”

Le rêve d’un jeune talent

Parmi les nouveaux “Quatre Mousquetaires” qui ont dominé le tennis masculin au cours des deux dernières décennies, deux d’entre eux ont récemment pris leur retraite, Jo-Wilfried Tsonga et Gilles Simon. Les deux autres, Gaël Monfils et Richard Gasquet, ont tous deux 36 ans et ne font pas partie du top 50 mondial.

La transition vers une nouvelle génération ne s’est pas faite sans accroc. Ugo Humbert, 24 ans, est actuellement le meilleur joueur français, à la 40e place, mais sa progression s’est interrompue depuis qu’il a fait irruption dans le top 30 en 2021. Le seul autre joueur dans le top 50 est Adrien Mannarino, 34 ans.

Un classement qui explique qu’aucun Français ne soit aujourd’hui tête de série en simple à Roland-Garros, pour la deuxième année consécutive. Comme lors des dernières éditions, il pourrait n’y avoir aucun Français en deuxième semaine du tournoi parisien.

Mais avec une nouvelle génération prometteuse de joueurs de moins de 20 ans, il y a matière à espérer. Depuis le début de l’année, huit joueurs français ont remporté un tournoi du Challenger Tour, le tremplin vers le circuit senior de l’ATP. C’est plus que n’importe quel autre pays.

La palme revient à Luca Van Assche et Arthur Fils. Le premier, qui a fêté ses 19 ans au début du mois, a déjà remporté deux de ces tournois cette année. Le second, qui n’a que 18 ans, a fait ses débuts à l’ATP en remportant l’Open de Lyon quelques jours avant son premier match à Roland-Garros.

Ils ne sont toutefois pas des nouveaux venus à Roland-Garros. En 2021, Luca Van Assche a remporté le titre junior à la porte d’Auteuil en battant son ami… Arthur Fils en finale. Pour leurs premiers pas dans la cour des grands lundi, ils ont connu des destins opposés : le premier a gagné son match, pas le second.

Arthur Fils a été éliminé par l’Espagnol Alejandro Davidovich Fokina, tête de série n° 29, en quatre sets (1-6, 6-4, 3-6, 3-6), tandis que Luca Van Assche a remporté une impressionnante victoire en trois sets (6-1, 6-1, 6-4) contre l’Italien Marco Cecchinato, demi-finaliste en 2018, porté par un public en délire.

“Avec l’aide du public, c’est toujours beaucoup plus facile pour nous, les Français, de jouer ici, c’est toujours une énorme force, on nous pousse du début à la fin”, s’est réjoui Luca Van Assche après le match. Il comptera à nouveau sur le public pour tenter de venger son copain Arthur Fils en affrontant mercredi le vainqueur du match, Alejandro Davidovich Fokina.

Parmi les 12 joueuses et joueurs français engagés mardi, seules Diane Parry, Océane Dodin et Arthur Rinderknech ont pour l’instant franchi l’obstacle du premier tour. Pas Fiona Ferro, Hugo Gaston, Selena Janicijevic, ni Giovanni Mpetschi-Perricard.

Cet article a été adapté de l’anglais par Barbara Gabel. L’original est à retrouver ici.

Advertisement

Trending

Derniers Tweets

You May Also Like

En Vedette

Le parlement polonais accueillera des experts et des organisations le lundi 12 septembre pour aborder le sujet urgent du traumatisme psychologique subi par la...

En Vedette

KAPIKULE, TURQUIE, 24 mai, 9:00 GMT]- Plus de 100 membres de la religion Ahmadi de paix et de lumière, une minorité religieuse persécutée, qui...

Monde

En marge de la visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky en Europe, des comptes ont partagé des images montrant trois propriétés de luxe qui...

Monde

Les sociétés militaires privées sont de nouveaux noms pour un vieux phénomène, les mercenaires.  Depuis les années 1990 le poids de SMP a été...