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L’aide médicale d’État, un enjeu au cœur des tractations du projet de loi Immigration

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est dit ouvert, dimanche, aux propositions des Républicains visant à faire évoluer l’aide médicale d’État (AME). Un dispositif accusé par ses détracteurs de créer un “appel d’air” migratoire, ce que démentent les spécialistes.

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Les opposants à l’aide médicale d’État (AME) auront-ils enfin sa peau ? Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a ouvert la porte, dans un entretien au Parisien publié dimanche 28 mai, à une réforme, dans le cadre de son futur projet de loi Immigration, de cette aide accordée aux étrangers en situation irrégulière. “Faut-il discuter des modalités de l’aide médicale d’État ? La réponse est oui”, a-t-il affirmé, dans le but affiché de satisfaire les sénateurs et députés Les Républicains (LR) qui voudraient remplacer l’AME par une aide médicale d’urgence.


Créée en 2000 sous le gouvernement de Lionel Jospin, l’aide médicale d’État donne droit aux étrangers en situation irrégulière et présents en France depuis au moins trois mois à une prise en charge à 100 % de leurs soins médicaux et hospitaliers. Sont couverts les maladies, les maternités, mais aussi les prothèses et soins dentaires ou encore les équipements d’optique, sur la base des tarifs de la Sécurité sociale.

La question de la suppression de l’AME est régulièrement relancée par la droite et l’extrême droite, qui voient en elle un dispositif créant un “appel d’air” vis-à-vis de l’immigration illégale. Lors de l’examen en mars au Sénat du premier projet de loi Immigration de Gérald Darmanin, les sénateurs LR avaient fait adopter en commission un amendement durcissant le dispositif.


Puis, dans un rapport parlementaire publié le 17 mai, c’était au tour de la députée LR Véronique Louwagie de s’inquiéter de l’accroissement du coût de l’AME. “En tenant compte des frais de gestion du dispositif et des créances irrécouvrables des hôpitaux laissées par des étrangers en situation irrégulière, le coût réel de l’AME s’élève environ à 1,2 milliard d’euros en 2022. En l’absence de réforme, ce montant devrait continuer de croître dans les prochaines années”, écrivait la députée dans son rapport sur “le coût des soins dispensés aux étrangers en situation irrégulière”, examiné en commission des finances.

Un nombre de bénéficiaires en augmentation

Selon la rapporteuse spéciale des crédits de la mission Santé, déjà autrice en 2021 d’un rapport sur l’AME, le nombre de bénéficiaires de cette aide s’élevait fin septembre 2022 à 403 144 personnes, un chiffre en hausse de 5,9 % par rapport à 2021 et de 20,5 % par rapport à 2019.

Dans son rapport, Véronique Louwagie appelait notamment à “recentrer l’AME sur les soins urgents ou, à défaut, redéfinir le panier de soins pour en exclure certains gestes médicaux”, ou encore à “exclure les demandeurs d’asile provenant de pays d’origine sûrs de la procédure d’admission au séjour pour soins”. Une philosophie reprise dans la récente offensive des chefs de LR visant à contraindre le gouvernement à proposer un texte ferme sur l’immigration.

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Si Gérald Darmanin, lui-même issu des Républicains, se montre ouvert à une discussion sur le sujet, la suppression ou la transformation de l’AME est toutefois loin d’être acquise, tant ce dossier divise la majorité présidentielle. Le député Sacha Houlié, représentant de l’aile gauche de Renaissance, a ainsi fait de la disparition de l’AME l’une de ses lignes rouges.

Invité à réagir sur le sujet dimanche midi, le ministre de la Santé, François Braun, a quant à lui rappelé que cette aide présentait des “enjeux de santé publique”. “Ça veut dire quoi l’urgence, ça veut dire combien de temps ? Est-ce qu’on va soigner un diabète qui est déséquilibré et qu’on va laisser se déséquilibrer après ?”, s’est-il interrogé lors du Grand jury RTL/LCI/Le Figaro.

S’il y a “un nouveau Covid qui arrive chez des gens qui pourraient bénéficier de l’aide médicale d’État, on ne va pas les traiter (…) et on va laisser la maladie se développer ? Il faut une vision globale de santé publique”, a-t-il insisté, tout en jugeant “anormal qu’il y ait des filières pour venir faire [en France] des soins qui peuvent être faits dans le pays d’origine de ces patients”.

“Une cause d’immigration marginale”

La Première ministre, Élisabeth Borne, avait elle-même récusé l’idée d’un “appel d’air” migratoire lié à l’AME lors du débat sur la politique d’immigration le 6 décembre à l’Assemblée nationale.

“Je veux enfin tordre le cou à une dernière idée reçue : non, l’aide médicale d’État ne nourrit pas l’immigration irrégulière. C’est une question de protection et de santé publique. Aucun projet migratoire vers la France n’est seulement motivé par l’existence de ce dispositif”, avait-elle alors déclaré.

Un discours en phase avec celui du Défenseur des droits, Jacques Toubon, qui regrettait en octobre 2019 la propagation de “l’idée fausse selon laquelle la ‘générosité’ d’un dispositif tel que l’AME conduirait à renforcer les flux migratoires illégaux en créant un ‘appel d’air’ alors que plusieurs études montrent que le besoin de soins est une cause d’immigration tout à fait marginale”.

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Ainsi, les motifs de santé ne sont évoqués que par 9,5 % des sans-papiers, selon une étude du CNRS publiée en février 2022. “Et le nombre de bénéficiaires réels est largement inférieur à celui de personnes qui pourraient en bénéficier, puisque le taux de non-recours [aux droits ouverts par l’AME] est estimé à 49 %”, soulignait la présidente de Médecins du Monde, Florence Rigal, dans un entretien au Parisien publié le 24 mars.

Mais au-delà des faits, l’AME est surtout devenue un enjeu politique. Pour Gérald Darmanin, il s’agira d’accéder aux demandes des Républicains pour faire passer son projet de loi ou ne pas diviser la majorité. Le débat pourrait être périlleux.

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