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Le financement de la transition écologique, sujet épineux pour le gouvernement

Le rapport sur le financement de la transition écologique remis lundi par l’économiste Jean Pisani-Ferry à la Première ministre Élisabeth Borne propose deux pistes jusqu’ici considérées comme des lignes rouges par le gouvernement : l’endettement et la taxation des plus riches. Les premières oppositions n’ont pas tardé à se faire entendre.

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La Première ministre Élisabeth Borne l’a rappelé, lundi 22 mai, lors de la présentation de son plan d’action de lutte contre le réchauffement climatique devant le Conseil national de la transition écologique (CNTE) : “Pour atteindre nos objectifs en 2030, nous devons doubler le rythme de baisse de nos émissions de gaz à effet de serre”. Le chemin à parcourir est immense et va nécessiter des investissements importants de la part de l’État. Mais la question du financement a été soigneusement évitée par la cheffe du gouvernement.

Celle-ci est pourtant cruciale et est traitée dans un rapport remis à Élisabeth Borne le même jour par l’économiste Jean Pisani-Ferry. Intitulé “Les incidences économiques de l’action pour le climat”, il souligne que la transition vers une économie décarbonée ne pourra réussir sans aider les ménages et alourdir la dette publique.

“La décarbonation va appeler à un supplément d’investissement” public et privé de 66 milliards d’euros par an, affirme le document dont la rapporteure est l’inspectrice générale des finances Selma Mahfouz.

Les années qui viennent sont qualifiées de “décennie de toutes les difficultés” avec des besoins massifs pour financer les nouvelles mobilités, l’industrie verte ou l’isolation des bâtiments, ou encore pour compenser l’effondrement du puits de carbone forestier français.

Pour Jean Pisani-Ferry, l’État ne doit pas hésiter à recourir à l’endettement. “Il y a beaucoup de mauvaises raisons de s’endetter, et le climat n’en est pas une ! Quand vous devez investir massivement sur une période courte, et que le retour sur ces investissements est prévu seulement au-delà de cette période, c’est précisément une raison de recourir à la dette publique”, affirme-t-il dans un entretien publié lundi 22 mai par Le Monde.

Convaincre les Français que “la charge est équitablement répartie”

Selon les préconisations de son rapport, l’endettement de l’État pour financer la transition écologique devrait s’alourdir “de l’ordre de dix points de PIB en 2030 [soit au moins 280 milliards d’euros, NDLR], quinze points en 2035, vingt-cinq points en 2040”.

Une politique en contradiction avec les objectifs de désendettement affichés par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui entend faire revenir la France dans les clous du pacte de stabilité européen avec un déficit inférieur à 3 % du PIB. Le Programme de stabilité (PSATB) 2023-2027 transmis par Bercy à Bruxelles fin avril prévoit ainsi un “retour à des comptes publics normalisés une fois les crises sanitaires et de l’énergie passées” avec un déficit public qui “reviendrait sous le seuil de 3 % de PIB à l’horizon 2027”.

Autre ligne rouge du gouvernement franchie par Jean Pisani-Ferry, qui avait pourtant chapeauté l’équipe en charge du programme d’Emmanuel Macron en 2017 : taxer les plus riches. “Pour financer la transition (…), un accroissement des prélèvements obligatoires sera probablement nécessaire. Celui-ci pourrait notamment prendre la forme d’un prélèvement exceptionnel, explicitement temporaire et calibré ex ante en fonction du coût anticipé de la transition pour les finances publiques, qui pourrait être assis sur le patrimoine financier des ménages les plus aisés”, peut-on lire dans le rapport remis à la Première ministre.

À lire aussi Canicules, sécheresses, maladies : à quoi ressemblerait une France à +4 °C ?

“D’ici à 2050, ce prélèvement pourrait représenter de l’ordre de 5 milliards d’euros par an. Ce n’est pas uniquement une question de ressources : il s’agit de convaincre les Français de ce que la charge est équitablement répartie”, affirme Jean Pisani-Ferry au Monde.

L’épisode des Gilets jaunes a en effet montré que l’équité fiscale devait être au cœur des politiques de transition écologique. La taxe carbone sur les carburants annoncée par le gouvernement en 2018 faisait proportionnellement peser un fardeau trop lourd sur les classes populaires et une partie des classes moyennes, qui ont alors exprimé leur mécontentement sur les ronds-points.

“Dans ce contexte, il est attendu des politiques climatiques qu’elles soient efficaces, mais aussi qu’elles soient justes”, souligne le rapport.

“Nous n’augmenterons pas les impôts”

“C’est intolérable pour les gens de s’entendre dire : ‘Vous ne pouvez plus utiliser votre voiture thermique’, alors que les plus aisés vont simplement payer leur week-end à Rome un peu plus cher”, ajoute Jean Pisani-Ferry toujours dans Le Monde.

Un discours qui ravit la gauche, qui propose depuis plusieurs années la création d’un “ISF climatique”, mais avec lequel n’est absolument pas en phase le gouvernement. Si le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a déclaré lundi soir, dans l’émission Quotidien, que taxer les plus riches n’était “pas un sujet tabou” car “on ne peut pas ne pas regarder en face la question des inégalités et une contribution”, d’autres éminents membres du gouvernement y sont clairement opposés.


“La transition écologique peut être autofinancée par les transformations qui sont nécessaires pour la rendre possible”, a soutenu le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, mardi matin sur France Inter, disant préférer “quelque chose qui transforme” plutôt que “quelque chose de punitif”. “Si une taxe suffisait à transformer notre pays et à verdir la planète, ce serait formidable. Mais je ne crois pas que ce soit vraiment l’enjeu. C’est plutôt de nous embarquer tous dans des changements de comportements, de modes de consommation et de mode de production”, a-t-il ajouté.


Même réflexe chez le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, invité de la matinale de RTL : “Je ne pense pas que ce soit la solution. Nous n’augmenterons pas les impôts”, a-t-il tranché, expliquant qu’il fallait en revanche “verdir notre fiscalité”. La question du financement de la transition écologique n’a pas fini de faire débat.

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