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Génération Erdogan : “Je vais choisir celui qui sera bon pour l’avenir du pays”

De notre envoyée spéciale en Turquie – Environ 5,2 millions de jeunes Turcs vont voter pour la première fois à l’élection présidentielle turque du 14 mai. Ils choisiront entre Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis 20 ans, Kemal Kilicdaroglu, Muharrem Ince et Sinan Ogan. France 24 est allé à leur rencontre. (2/2)

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Recep Tayyip Erdogan rêvait d’en faire une génération “pieuse”. Eux aspirent à se libérer des carcans de la religion et à davantage de liberté.  

Selon un récent sondage cité par l’AFP, seuls 20 % des 18-25 ans voteront pour le président turc et son parti islamo-conservateur, l’AKP, aux élections présidentielle et législatives du 14 mai. 

“Ils vont porter leurs suffrages sur Kemal Kilicdaroglu ou le candidat du CHP à la présidentielle de 2018 Muharrem Ince, beaucoup plus populiste et nationaliste. Aujourd’hui dissident, il est crédité de 5 à 6 % des voix”, précise Ahmet Insel, politologue et éditeur turc.  

Une manière pour Emrah, Fatma Reyyan et Izot de se tourner vers un avenir plus démocratique. 

Emrah Ardiç, 21 ans, Kahramanmaras, sud-est de la Turquie

Emrah Ardiç, Kahramanmaras, Turquie.
Emrah Ardiç, Kahramanmaras, Turquie. © Assiya Hamza

Sa moustache pend de chaque côté de la bouche, laissant penser à celles qu’arborent fièrement les ultranationalistes du parti MHP. Emrah est en deuxième année d’administration sportive. Il sous-pèse chacun de ses mots. 

“Je vais voter pour la première fois. C’est une élection cruciale pour le pays, pour les jeunes en particulier. Je pense que la priorité c’est l’économie. Avant 2010, l’économie se portait mieux. Le pouvoir d’achat des Turcs était plus élevé. Il faut penser à notre avenir. 

Tous les sondages disent qu’il y aura un second tour. Kilicdaroglu a promis d’assurer la sécurité des bureaux de vote. Bien sûr que je sais pour qui je vais voter mais cela doit rester secret. Vous comprenez, c’est compliqué en Turquie… Je vais choisir celui qui sera bon pour l’avenir du pays. 

C’est très compliqué d’avoir 20 ans en Turquie. Quand on se compare à ceux de notre âge, notamment en Europe, nos préoccupations ne sont pas les mêmes. Ils s’amusent, ils parlent de choses légères. Nous nous parlons de stratégie politique.

Je veux lancer un appel aux jeunes turcs. Ne faites pas comme nos aînés, ceux qui ont 40 ans et qui prennent leurs décisions en regardant la télévision. Ne croyez pas non plus à tout ce que vous voyez sur les réseaux sociaux. Documentez-vous pour vous faire une opinion. 

Si j’avais l’opportunité de partir, je n’hésiterais pas, je partirais. Je sais que l’Europe n’est pas un Eldorado. Les jeunes sont plus valorisés. Ils ont de meilleures conditions de vie et ne sont pas jugés à l’aune de ce qu’ils pensent.”

Fatma Reyyan Ince, 19 ans, Kahramanmaras, sud-est de la Turquie

Fatma Reyyan Ince espère aller à la faculté de droit d'Antalya, en Turquie.
Fatma Reyyan Ince espère aller à la faculté de droit d’Antalya, en Turquie. © Assiya Hamza

Attablée sur une terrasse de café avec une amie, Fatma Reyyan s’accorde une petite pause entre deux révisions de l’examen d’entrée à l’université. La lycéenne espère intégrer la faculté de droit d’Antalya. 

“Je suis très heureuse à l’idée de voter pour la première fois mais aussi très stressée par mon examen. Depuis trois mois, avec ce qui s’est passé (tremblements de terre, NDLR), je m’intéresse davantage à la politique. La période est très difficile. 

Je sais pour qui je vais voter : Meherem Ince. S’il y a un deuxième tour, Inch Allah, ça sera Kilicdaroglu. 

Mon père est pro AKP. Ma grand-mère maternelle également. Ma mère et moi pensons la même chose. Il y a une grande différence entre générations. Nous sommes très ouverts d’esprit contrairement aux anciens et nous réfléchissons aux conséquences de chaque décision. 

Il est très difficile d’avoir 20 ans aujourd’hui en Turquie. L’économie va mal. Nous devons penser à nos études. C’est très dur pour nous. Je veux rester ici. Il est impossible d’envisager de quitter le pays. Même si dans 10 ans rien n’a changé, je n’irai nulle part. Je rêve d’un pays libre. 

Je pense qu’il est au pouvoir depuis aussi longtemps parce que les gens lui font confiance. Il a fait ce qu’il a promis. S’il change des choses au niveau économique, il peut être réélu. 

La Turquie est un beau pays. Si nous relançons l’économie, nous retrouverons le succès.”

Izot, 20 ans, Istanbul 

Izot milite pour les droits  LGBT en Turquie.
Izot milite pour les droits LGBT en Turquie. © Assiya Hamza

Il se définit comme une sorte d’activiste de la cause LGBT. Bien que dépénalisée depuis 1858 en Turquie, l’homosexualité reste un sujet tabou dans une société largement conservatrice et musulmane. Izot aspire à faire des documentaires dans la sphère politique afin de changer le monde. 

“C’est la première fois que je vais participer à l’élection présidentielle. C’est très important. Je ne sais pas encore pour quel parti je vais voter à l’élection parlementaire mais je voterai pour Kilicdaroglu à la présidentielle.  

Être LGBT et en parler ouvertement est très difficile en Turquie. Dans les grandes villes, c’est plus simple mais nous avons peur même quand nous sommes entre amis dans un café. On doit utiliser un certain vocabulaire pour que les gens ne nous comprennent pas. On appelle ça ‘Lubunca’ (langage argotique secret en Turquie utilisé par les LGBT pour communiquer). 

Nous avons toujours peur. Il y a beaucoup de suicides, les gens sont tués. Lors de Nehrouz, la fête du printemps, à Diyarbakir, des gens ont été attaqués aux cris de ‘nous ne voulons pas de PD ici !’.  

Les agressions verbales, les menaces ont augmenté sur les réseaux sociaux.  Si vous avez un drapeau arc-en-ciel sur votre photo de profil, vous vous faites insulter. 

Je veux vivre dans un monde où l’on peut marcher sans avoir peur, où l’on peut affirmer son identité. J’aimerais que la Turquie devienne une démocratie moderne. Je sais que ça ne sera pas facile mais nous voulons les mêmes droits. Nous voulons marcher main dans la main avec nos partenaires. Nous voulons que les partis politiques prennent en compte la communauté LGBT, que nos droits LGBT fassent partie de leurs programmes. 

Mes parents connaissent mon activisme, pas mon identité. Je suis prêt à en parler. C’est ma famille. Je suis leur fils. J’ai envie de croire qu’ils l’accepteront.”

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