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Pénuries de pilules abortives : une menace pour l’accès à l’IVG en France ​​​​​​​?

Alors que 70 % des interruptions volontaires de grossesse (IVG) sont d’origine médicamenteuse en France, de nombreuses pharmacies ne disposent plus dans leurs rayons de pilules abortives. Une situation inquiétante qui rappelle la vulnérabilité d’une filière de production concentrée dans les mains d’un seul laboratoire aux capitaux majoritairement américains.

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La France va-t-elle manquer de pilules pour permettre aux femmes d’avorter ? Depuis plusieurs semaines, des pharmacies d’Île-de-France, de la région lilloise ou encore d’Occitanie ne proposent plus de pilules abortives ou peinent à en commander. En cause, des tensions sur le misoprostol, l’un des deux médicaments nécessaires à l’expulsion de l’embryon.

L’alerte a été lancée il y a déjà plusieurs semaines par l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament (OTMeds) et relayée depuis par des professionnels de santé, des antennes du Planning familial ainsi que des responsables politiques de la Nupes, comme la député écologiste Sandrine Rousseau.


“Il y a une tension, il n’y a pas de pénurie”, a assuré de son côté le ministre de la Santé François Braun, dans une interview accordée mercredi à RMC. “Les boîtes de 16 comprimés sont toujours disponibles à l’hôpital. L’accès à cette pilule abortive est possible partout.”

“Le terme officiel de ‘tensions’ ne permet pas de mesurer la réalité de la disponibilité d’un produit sur le terrain sur un territoire donné, à un moment donné”, rétorque OTMeds dans un communiqué qui accuse François Braun de minimiser la gravité de la situation. “Il est inacceptable qu’un médicament aussi important soit indisponible, ne serait-ce qu’une semaine. C’est ce qui est arrivé et qui arrive encore avec cette pilule”, ajoute l’Observatoire engagé à gauche.

>> À lire sur France 24.com : l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution française, un parcours semé d’embûches

Pour tenter de remédier à ces “tensions”, le ministère de la Santé a annoncé mardi des importations de pilules abortives depuis l’Italie. Selon les autorités sanitaires, ces problèmes d’approvisionnement devraient s’apaiser d’ici la fin du mois d’avril. 

Si ces pénuries restent localisées et limitées dans le temps, elles font craindre une limitation de l’accès à l’IVG “portant une grave atteinte aux droits sexuels et reproductifs des femmes”, a alerté mardi le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), rappelant que 70 % des IVG pratiquées sont médicamenteuses.

Comment s’expliquent ces pénuries ?

En France, deux spécialités à base de misoprostol sont autorisées dans les IVG médicamenteuses, Gymiso et Misoone. Or, elles ne sont commercialisées que par un seul laboratoire : Nordic Pharma. Le géant pharmaceutique, aux capitaux largement américains, a récemment reconnu des “difficultés au niveau des sites de fabrication des produits finis”.

Cette extrême concentration de la production rend donc particulièrement vulnérable la filière, d’autant qu’il n’y a actuellement aucune alternative au misoprostol car le médicament est encore sous brevet et qu’il n’existe pas de génériques. 

“S’il y a un souci industriel, une impureté sur l’un des sites, pas ou peu d’usines peuvent prendre le relais. La production est donc ralentie pendant des semaines, voire des mois”, explique auprès de Libération Jérôme Martin, le cofondateur d’OTMeds, qui déplore un éclatement de la production entre plusieurs pays participant à ces problèmes d’approvisionnement.

“Il faut que nous soyons souverains sur un sujet aussi important et que nous soyons capables de rapatrier d’une manière ou d’une autre la production en France ou en Europe en créant une pilule ou en rachetant le brevet”, affirme Sylvie Pierre-Brossolette, la présidente du HCE qui alerte depuis trois ans les pouvoirs publics sur cette situation.

“Un risque majeur” venant des États-Unis

Au cours des derniers mois, des tensions ont pesé sur les stocks de plusieurs médicaments. Le paracétamol et plusieurs antibiotiques, dont l’amoxicilline, étaient ainsi en rupture de stock relançant le débat autour de la souveraineté sanitaire.

Mais cette fois, la pénurie touche au sujet sensible de l’accès à l’avortement, alors même que ce droit est mis sur la sellette aux États-Unis depuis la décision de la Cour suprême de remettre en cause l’IVG au niveau fédéral.

>> À lire aussi : juridiquement, la Cour suprême fait revenir les États-Unis “au début du XXe siècle”

La mifépristone, l’autre médicament nécessaire avec le misoprostol pour mener un avortement chimique, est actuellement au cœur d’une guérilla juridique outre-Atlantique qui menace sa disponibilité sur l’ensemble du territoire américain.

Pour anticiper un éventuel arrêt de la production ou de la commercialisation, “certains États américains seront tentés de faire des stocks, ce qui va favoriser les pénuries et faire grimper les prix”, s’inquiète Sylvie Pierre-Brossolette.  

La situation de monopole de Nordic Pharma en fait également une cible de choix pour les lobbies anti-IVG américains. Une campagne de boycott d’une entreprise destinée à la décourager à produire des pilules abortives ne serait d’ailleurs pas une première.

En 1997, le laboratoire Roussel-Uclaf, filiale française détenue par le groupe chimiste allemand Hoechst, avait cédé ses droits sur la mifépristone, après des menaces de boycott des autres produits du groupe en Allemagne et aux États-Unis.

“Il y a un risque majeur qui vient des États-Unis et on ne peut pas laisser les femmes françaises et européennes à la merci des militants anti-IVG ou d’une seule entreprise”, estime Sylvie Pierre-Brossolette, qui appelle les pouvoirs publics à veiller à garantir l’accès à l’IVG à l’heure où le gouvernement entend inscrire ce droit dans la Constitution.

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