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Face à l’adhésion croissante au nucléaire en France, les écologistes contre-attaquent

Alors que plusieurs récents sondages montrent une adhésion plus forte des Français à l’énergie nucléaire, et notamment chez les jeunes sympathisants écologistes, le parti Europe Écologie-Les Verts (EELV) lance la contre-offensive et, douze ans après la tragédie de Fukushima, appelle à une Convention citoyenne.

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“La faute des écologistes depuis Fukushima, c’est d’avoir cru qu’on avait gagné la bataille. On s’est dit que la rationalité allait l’emporter, mais on a sous-estimé la puissance du lobby nucléaire”, estime l’ancien candidat d’Europe Écologie-Les Verts (EELV) à l’élection présidentielle, Yannick Jadot, vendredi 10 mars, lors d’une “master class” sur le nucléaire organisée par son parti à Paris.

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Alors que le projet de loi visant à accélérer les procédures liées à la construction de nouveaux réacteurs nucléaires arrive à l’Assemblée nationale, lundi 13 mars, les écologistes entendent réinvestir la bataille culturelle et appellent à l’organisation d’une Convention citoyenne sur le nucléaire.

“On repart au combat, affirme la secrétaire nationale d’EELV, Marine Tondelier. On va faire cette proposition de Convention citoyenne. Si vous prenez en France 150 personnes tirées au sort, que vous faites en sorte qu’elles puissent travailler sérieusement, en ayant accès à un débat contradictoire et rationnel sur le sujet, je fais le pari qu’en sortant [leur] avis ne serait pas en faveur du nucléaire.”

>> À voir : En France, fin de la disgrâce pour l’énergie nucléaire ?

Si les écologistes se mettent en ordre de bataille, c’est que plusieurs récents sondages ont montré une plus grande adhésion des Français à l’énergie nucléaire. Ils sont ainsi 60 % à avoir une image positive du nucléaire, selon un sondage Odoxa publié le 6 janvier, quand ils n’étaient que 34 % en 2019. Et 71 % des personnes interrogées se disent favorables au projet de loi sur l’accélération des procédures pour la construction de nouveaux réacteurs.

Pire, de nombreux sympathisants EELV semblent désormais avoir tourné le dos à la bataille historique des écologistes : ils sont 51 % à juger que l’énergie nucléaire a de l’avenir, selon un sondage Elabe du 3 novembre 2022. Un an plus tôt, ils n’étaient que 39 % à partager ce sentiment.

“Faire en sorte que les Français aient le débat qu’ils méritent”

En cause, les conséquences de la guerre en Ukraine qui a mis l’accent sur la dépendance énergétique de l’Europe, et en particulier du voisin allemand, au gaz russe. Les difficultés rencontrées par Berlin, de même que la forte hausse des prix de l’énergie, ont donné du poids à l’argument des pro-nucléaires sur l’indépendance énergétique de la France – même s’il convient de nuancer cet argument, la France ne disposant pas de mines d’uranium.

Le succès en librairie de la bande-dessinée de Jean-Marc Jancovici, “Le monde sans fin” (éd. Dargaud) – livre le plus vendu en France en 2022 avec 514 000 exemplaires écoulés –, et l’omniprésence médiatique de son auteur, expliquent également l’évolution de l’image du nucléaire.

>> À voir : Le nucléaire en débat, quelle place pour l’atome dans la transition énergétique en France ?

L’ingénieur à la tête du groupe de réflexion Shift Project, créateur du bilan carbone, y fait l’apologie de l’énergie nucléaire, tout en décrédibilisant les énergies renouvelables, qu’il juge trop coûteuses et pas assez rentables en termes de production électrique. Les affirmations de Jean-Marc Jancovici ont depuis été contredites dans de nombreux articles de presse (notamment ici ou ici), mais pour EELV, le mal est fait.

“C’est vrai que cette BD est un problème pour nous, reconnaît en off un membre de la direction du parti. D’un côté elle a permis de faire prendre conscience à un grand nombre de personnes de l’urgence climatique devant laquelle nous nous trouvons, mais en même temps elle a convaincu les lecteurs que le nucléaire était la seule solution en matière d’énergie.”

Marine Tondelier souhaite donc “rattraper le retard pris dans l’opinion”. Mais avec un projet de loi d’accélération des procédures liées à la construction de nouveaux réacteurs nucléaires déjà voté au Sénat et qui, en l’état, met fin à la trajectoire d’abaissement de la part du nucléaire à 50 % dans le mix énergétique français, il y a urgence pour les opposants à l’atome.

“Quand votre prototype ne marche pas, on ne dit pas qu’on va en lancer six autres”

“On est dans le bon timing, veut croire Yannick Jadot. Dans cette loi, par le fait du prince, il y a des objectifs inscrits qui ne relèvent normalement pas de ce texte, mais de la PPE [loi de programmation pluriannuelle de l’énergie] qui arrivera au printemps ou à l’été. Donc il est encore temps. J’espère que nous parviendrons à faire en sorte que les Français aient le débat qu’ils méritent.”

Un débat sur le nucléaire a bien été organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP) du 27 octobre eu 27 février. Celui-ci portait précisément sur le programme proposé par EDF de six réacteurs nucléaires de type EPR2, dont les deux premiers seraient situés à Penly, en Normandie. Mais dans un communiqué daté du 8 février, la CNDP, qui pointe le vote au Sénat du projet de loi et la tenue d’un Conseil de politique nucléaire le 3 février à l’Élysée, interroge : “Pourquoi débattre, alors que les décisions sont déjà perçues comme prises, et que la machine est en route ?”

>> À lire : Agriculture, centrales nucléaires… Comment l’eau est consommée en France

Les écologistes prennent donc le relais. “On va faire cette proposition de Convention citoyenne sur le nucléaire, et peut-être que si Macron n’y répond pas favorablement, on devra l’organiser nous-mêmes”, déclare Marine Tondelier, qui regrette que l’examen du projet de loi visant à accélérer les procédures de construction de nouveaux réacteurs nucléaires arrive à l’Assemblée nationale au moment où les Français ont l’esprit plutôt tourné vers la réforme des retraites.

Le nucléaire est “une filière de manipulation et de mensonges”, affirme-t-elle. “Si ces mensonges avaient été faits dans un autre secteur, les gens seraient en prison. On mise toute notre politique énergétique et climatique sur un mirage. L’EPR de Flamanville, c’est le meilleur exemple. Quand votre prototype ne marche pas, on ne dit pas qu’on va en lancer six autres.”

Lancé en 2007, le chantier du réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville, dans la Manche, devait initialement être achevé en 2012, pour un budget total de 3,3 milliards d’euros. Le démarrage du réacteur est aujourd’hui prévu pour mi-2024. Son coût a été réévalué par EDF à 13,2 milliards d’euros.

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